~ La mémoire humaine ~
La mémoire humaine a-t-elle une limite ?
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Bienvenue sur le site de notre TPE, réalisé par Emma B., Honorine D. et Léonie D., élèves de 1ère S au lycée Blaise Pascal de Longuenesse en 2015/2016. Bonne visite !

 

6) Hypermnésie : le fardeau de la mémoire absolue

         


    Souvent perçue comme un précieux don, une mémoire exceptionnelle peut aussi relever de la pathologie. Les hypermnésiques se souviennent de tout, tout le temps. Un trouble rare qui interroge les scientifiques. Le nombre de personnes atteintes d’hypermnésie dans le monde se compte sur les doigts de la main.
          Jill Price, une femme américaine née en 1965, possède une compétence extraordinaire : elle est capable de détailler n’importe quel jour vécu dans sa vie depuis l’âge de 14 ans. Pour elle, chaque jour du passé est aussi frais dans sa mémoire que celui de la veille. Si son entourage voit dans cette prouesse un véritable don du ciel, elle la considère comme un fardeau. En effet, elle est incapable de faire face à ce flux incessant de souvenirs. Des bons, mais aussi des mauvais : difficile d’avancer quand les épisodes douloureux de la vie semblent tous s’être déroulés hier… Dès qu’une date apparaît à la télévision, son esprit détaille de façon incontrôlable tout ce qu’elle a vécu cette journée-là. En outre, elle retrace sa vie entière dans sa tête tous les jours et cela la rend folle. En 2000, alors qu’elle a 35 ans, elle décide de contacter un célèbre neurobiologiste américain de l’université de Californie, James McGaugh. Dans une lettre, elle lui explique tout ce qu’elle est capable de faire et espère obtenir de l’aide.
          Le scientifique est d’abord sceptique face à cette forme d’hypermnésie jusqu’alors inconnue. À l’époque, on sait seulement que certaines personnes atteintes d’un trouble autistique semblent avoir des capacités exceptionnelles, comme retenir la quasi-intégralité d’un livre, ou encore mémoriser un paysage dans ses moindres détails. C’est cette prouesse qu’est capable de réaliser Stephen Wiltshire, un autiste anglais né en 1974. Il peut dessiner une ville entière de mémoire après l’avoir survolée pendant une heure !
          D’autres, que les Anglo-Saxons appellent mnemotists, peuvent retenir des suites de chiffre extraordinairement longues, ou encore l’ordre des cartes dans un jeu mélangé grâce à des moyens mnémotechniques. Mais ces prouesses résultent d’un entraînement régulier et n’ont rien à voir avec une quelconque pathologie.
        De plus, il existe également un trouble psychiatrique qui peut entraîner une forme d’hypermnésie : le syndrome de stress post-traumatique. Les sujets atteints se rappellent avec précision une scène traumatisante de leur vie. Contrairement à 1 souvenir classique (dont on a conscience qu’il représente un élément du passé), cette scène est revécue par les malades comme si elle se déroulait réellement devant leurs yeux. Ces images s’imposent à eux souvent de façon terrifiante. Un excès de souvenirs n'est finalement pas plus enviable qu'un défaut de mémoire. Dès 1954, le psychiatre français René Targowla - après avoir observé plusieurs survivants de camps de concentration atteints du trouble – nomme ce phénomène ''hypermnésie émotionnelle paroxystique tardive''. Il contient des éléments hypermnésie, mais aussi d’amnésie, car les patients se souviennent de certains points très précis et en oublient totalement d'autres.
          En 2006, James McGaugh, après avoir effectué une batterie de tests qui dureront cinq ans sur Jill Price, nomme la pathologie dont elle est atteinte hyperthymesia (du grec thymesis, se souvenir). Mais les scientifiques parlent alors d’hypermnésie autobiographique. En effet, Jill Price se souvient d’éléments la concernant, mais éprouve de grandes difficultés à retenir des dates historiques ou à réciter un poème. Une mémoire exceptionnelle donc, mais aussi sélective.
          Par la suite, 100 personnes contacteront le chercheur et 10 seront diagnostiquées hyperthymésiques. Il observe alors leur cerveau par IRM (Imagerie par Résonance Magnétique), et constate des points communs entre ces surdoués de la mémoire :

--> Un lobe temporal surdéveloppé, où a lieu le stockage de la mémoire sémantique ;
--> Un noyau caudé anormalement gros, impliqué notamment dans les habitudes et comportements sociaux, mais surtout lié aux troubles obsessionnels compulsifs, les fameux TOC.
 
L'hypermnésie pourrait-elle être similaire à un TOC, les patients accumulant compulsivement non pas des objets, mais leurs souvenirs, même inconsciemment ? Quoi qu’il en soit, la plupart des patients admettent essayer régulièrement de se rappeler maximum de souvenirs sur le plus grand nombre jours possibles, comme un passe-temps ou un rituel.
          Aujourd’hui, seules quelques douzaines de personnes ont été diagnostiquées hyperthymésiques dans le monde. Mais il s’avère important d’étudier ces pathologies pour soigner les malades et comprendre le fonctionnement de notre mémoire. Il est probable que l’hyperthymnésie nous apprendra dans les prochaines années de nombreuses informations sur notre cerveau. Et elle nous révèle d’ores et déjà une chose : nous sommes capables d’engranger bien plus de souvenirs que ce que nous pensions.
 
 



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